Man Ray, Paul Eluard : la liberté dans le livre
« Elle [la poésie] est l’acte pur – l’acte de suprême libération – le seul par lequel un homme, en tant que poète, puisse se donner profondément à lui-même le sentiment d’exister en toute liberté. » Pierre Reverdy, La Fonction poétique, 1950.
Si la langue latine distingue les deux mots « liber » en fonction de la voyelle i, longue ou courte, l’homographie invite à réunir ce qui relève de l’absence de soumission à une autorité humaine ou dogmatique et ce qui désigne la pellicule se trouvant entre l’écorce et le bois, sur laquelle on écrivait.
Envisager le livre comme lieu de liberté, c’est aussi le concevoir comme un véritable moyen de création. C’est du moins ainsi que semblent l’entendre Paul Eluard et Man Ray, dont l’esthétique respective trouve un écho dans le croisement de la photographie ou du dessin et du poème, et dans la relation entre ces deux mediums visuels et verbaux. Cette relation, qui est de l’ordre d’un regard qui circule entre l’artiste et le poète, donnant à voir et à lire, et le lecteur spectateur, fait à son tour du livre un medium apte à susciter la liberté interprétative.
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Le titre du recueil Les Mains libres, publié en 1937, laisse entendre ce parti pris de liberté, nécessaire à la création et au renouvellement esthétique, liberté affirmée dès le début du XXe siècle, notamment par les futuristes et les poètes de l’Esprit nouveau. C’est aussi ce titre que reprend, dans les années 1960, Jean Petithory pour sa librairie, galerie et maison d’édition, conjuguant la redécouverte des premières avant-gardes et la découverte des nouvelles expérimentations poétiques et artistiques.
Avoir les mains libres, c’est avoir carte blanche. Mais l’expression place aussi au centre de la créativité l’expérience physique du corps touchant et touché, percevant et perçu. Cette perspective souligne l’inscription de l’œuvre dans le contexte des avant-gardes littéraires et artistiques, mais aussi la singularité inhérente à toute création mue par le désir de partager une expérience sensible.
Isabelle Chol
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Plan de l’article
I. Man Ray et Paul Eluard dans le contexte des avant-gardes
1. Dadaïsme et surréalisme : un parti pris de liberté
2. Les productions de Paul Eluard et de Man Ray dans les années 1930
3. “La poésie doit être faite par tous et non par un” (Lautréamont)
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II. La rencontre du texte et de l’image dans le livre
1. Les modèles convoqués : livre illustré, livre d’emblèmes
2. Un livre de dialogue ?
3. “Apprendre à voir et désapprendre à reconnaître” (Jean-François Lyotard)
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III. “Les Mains libres” : un parti pris esthétique
1. Les relations entre le titre, le texte, l’image
2. La liberté des associations
3. L’évidence du désir
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• Entrées sur Eluard. “Les Mains libres”, de Paul Eluard et Man Ray, par Frédéric Palierne.
• Exposition Paul Eluard, “Poésie, amour et liberté”.
• Man Ray, “Autoportrait”, par Stéphane Labbe.
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