Les cursus binationaux, une ouverture internationale pour des enjeux actuels
Les enjeux des cursus scolaires binationaux ne reposent pas uniquement sur le fait d’acquérir un très bon niveau en langue étrangère nécessaire à la poursuite des études supérieure dans un pays étranger mais bien de se familiariser avec une autre culture. Il s’agit davantage d’une aventure humaine empreinte de partage, de cohésion et d’échanges humanistes.
L’enjeu est bien plus philosophique et social que linguistique. Car l’essentiel des sections binationales de lycées réside dans l’intercompréhension, dans la comparaison des cultures. L’exemple de l’Abibac est intéressant pour comprendre en quoi l’amitié entre deux pays, en l’occurrence la France et l’Allemagne, a fait naître ce projet se fondant alors, non pas sur des élites politiques, mais bien sur la société civile.
L’exemple de l’Abibac
À l’heure actuelle, les lycéens qui se préparent à intégrer de grandes écoles, qu’elles soient en France ou à l’étranger, qui s’engagent dans une voie universitaire, doivent avoir une ouverture sur le monde qui dépasse l’apprentissage pur des langues, ce qui les encourage à s’orienter vers ces sections bi-nationales.
L’Abibac est un examen unique qui permet la délivrance simultanée du baccalauréat français et de son équivalent allemand, Abitur, depuis 1994, date à laquelle les premiers projets d’échanges Voltaire et/ou Brigitte Sauzet ont vu le jour, au terme de plusieurs décennies de discussions entre la France et l’Allemagne. De plus, il donne accès de plein droit aux universités françaises et allemandes.
L’inscription s’effectue sur dossier à l’entrée en classe de seconde dans un des 87 établissements ayant une section Abibac Ces sections sont accessibles à tous les élèves se destinant aux séries générales et possédant un bon niveau en allemand. Il n’est pas nécessaire d’avoir été inscrit dans une section européenne en 4e et en 3e.
Les lycéens préparant l’Abibac suivent les programmes nationaux français, sauf en allemand et en histoire et géographie, disciplines à programmes spécifiques pour ce cursus.
- En allemand, l’horaire hebdomadaire est de 6 heures (langue, civilisation, littérature) ;
- En histoire et géographie (4 heures par semaine), l’enseignement se fait intégralement en langue allemande.
Les élèves passent normalement les épreuves de baccalauréat de leur série, à l’exception de deux épreuves spécifiques qui permettent la double délivrance des diplômes :
- un examen écrit de littérature allemande et un oral d’allemand obligatoire en présence d’un examinateur allemand ;
- en histoire et géographie, l’épreuve écrite a lieu en langue allemande, ce qui correspond aux enseignements suivis au cours des trois années de scolarité au lycée.
Le climat scolaire, dans une section Abibac, se veut proche de celui qui règne en Allemagne. Par exemple, le système scolaire allemand privilégie une proximité forte entre l’élève et l’enseignant, le tutoiement peut y être pratiqué sans tabou. Les cours dispensés en Abibac ont également pour vocation de transférer cet esprit différent, car il permet de s’acculturer davantage au système scolaire de l’autre pays. Cela permet entre autre de comparer les modalités pédagogiques, le rôle de l’oralité, du débat-discussion… entre les deux pays.
L’Abibac et ensuite ?
Que deviennent ces jeunes qui sont deux fois diplômés, Baccalauréat et Abitur ?
La plupart d’entre eux suivent des parcours universitaires classiques en France, d’autres intègrent un cursus intégré. Ces cursus intégrés sont pilotés par l’université franco-allemande et permettent aux étudiants de partager leur temps d’études en deux semestres par exemple, l’un en France et l’autre en Allemagne, quel que soit le parcours université choisi, et ce, grâce à des subventions dédiées aux partenariats et aux échanges. Les étudiants terminent alors leur cycle d’études avec deux diplômes en poche et de même niveau. Ces cursus intégrés sont également possible dans les écoles d’ingénieurs, Institut d’études politiques, Sciences politiques…
Enfin, certains lycéens, choisissent de partir en Allemagne pour y faire leurs études ou bien encore un service civique, intégrer une association et continuer ainsi l’usage de la langue et l’apprentissage de la culture avant de faire un choix d’orientation définitif.
Il faut souligner que l’apprentissage des langues en France est en phase d’évolution car les enjeux évoluent au gré des changements sociétaux, des flux migratoires, des lobbyings d’entreprises…Aussi, des écoles privées, alternatives, conventionnées ou non, fleurissent sur le sol français afin de répondre à ces nouveaux besoins.
Delphine Roux,
proviseure-adjointe du lycée du Bois d’Amour, Poitiers
N.B. Un grand merci à Olivier Blanchard, professeur d’allemand au lycée du Bois d’Amour pour son aide et ses éclairages précieux.