Collège 2017 : d'une utopie égalitaire à une utopie libérale ?
Par le canal des associations de professeurs de langues anciennes, par la voie des syndicats enseignants, par les sites professionnels ou spécialisés, l’information est parvenue à tous : le retour à la liberté des enseignements facultatifs du latin au cycle 4, le retour au classes bilangues au cycle 3 et l’assouplissement du « carcan des EPI ».
Le moins que l ‘on puisse dire c’est que le dénommé « aménagement » de la réforme du collège a été rapide, discret (peu médiatisé) et sans discussion. Tout le contraire de la réforme qui avait été longue à mettre en place, publique, et abondamment discutée. Pas même de véritable temps de mise à l’épreuve ou d’évaluation.
Les enseignants, après bien du temps passé à imaginer le travail collectif à faire en EPI, se voient inviter à tout abandonner et à revenir aux anciens modes de fonctionnement. Il était urgent de restaurer…
Pourquoi pas ? L’allemand et le latin y trouvent leur compte, leur survie même, mais l’enjeu n’était pas là et il n’en reste pas moins que les enseignements facultatifs de ce type restent une source de stratégie pour des parents initiés, et un calcul pragmatique pour des établissements soucieux de leurs équilibres. Même si la page du ministère réfute l’objection d’inégalité: « il faut sortir du mythe d’une uniformité qui garantirait l’égalité« , on attend des preuves d’une autonomie solution » pour régler les difficultés des élèves« .
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Inégalité des besoins mais égalité des devoirs ?
Quiconque a l’expérience du terrain , des territoires, sait que l’inégalité de choix, de parcours, d’enseignants existe déjà entre établissements de province et établissements de grandes villes, entre zones rurales et capitales régionales et l’on peut douter que la souplesse accordée aux chefs d’établissement améliore les choses : n’y a t- il pas à craindre que l’expression « adaptation aux besoins » soit le nouvel euphémisme désignant les inégalités ?
La réforme antérieure avait-elle d’ailleurs réalisé cet idéal d’égalisation de chances et des parcours ? N’avait-elle pas déjà cédé en accordant le droit à certains lycées parisiens de conserver des classes bilangues et un enseignement du latin en cycle 4 ? N’est-ce pas le passage de témoin d’une utopie égalitaire à une utopie libérale ?
Seul un point non commenté de l’aménagement de la réforme mérite peut-être une adhésion sans réserve : le programme « devoirs faits« . Il s’agit de mettre en place une aide après la classe afin que tout élève puisse trouver l’accompagnement nécessaire pour que ses devoirs soient faits, sinon à domicile, du moins dans l’établissement. C’est un peu l’étude dirigée d’autrefois. Les enseignants pourront prêter leur assistance en échange de rémunération mais aussi des assistants, des retraités, des associations.
Il ne faut jamais désespérer.
Pascal Caglar