L’éducation aux médias et à l’information à l’ordre du jour

L’éducation aux médias et à l’information à l’ordre du jourL’éducation aux médias, devenue depuis quelque temps éducation aux médias et à l’information (ÉMI) dans les programmes, n’est toujours pas une matière, mais « elle irrigue tous les savoirs » et « met en œuvre des compétences et connaissances spécifiques selon les domaines du socle ».
« Dans une société marquée par l’abondance des informations, l’élève apprend à devenir un usager des médias et d’Internet conscient de ses droits et devoirs et maîtrisant son identité numérique, à identifier et évaluer, en faisant preuve d’esprit critique, les sources d’information à travers la connaissance plus approfondie d’un univers médiatique et documentaire en constante évolution. Il utilise des outils qui lui permettent d’être efficace dans ses recherches ».

 

Internautes et journalistes en concurrence dans la diffusion des informations

Le récent fait divers du crash volontaire de l’Airbus A320 de la Germanwings dans les Alpes a mis en évidence le lien entre les informations au sens de données (data) et les informations au sens de nouvelles journalistiques (news). En effet, comme l’a mis en valeur l’émission Le Petit Journal du 1er avril 2015, grâce aux applications aux réseaux sociaux et au web, l’information circule de plus en plus rapidement et les journalistes sont parfois dépassés par des internautes.
Par exemple, l’application Flightradar24 permet de suivre tous les déplacements des avions si bien que lorsque l’on dispose du numéro du vol, on peut rapidement trouver sur Youtube des photos de l’appareil. Secouristes, forces de l’ordre et voisins du crash ont immédiatement diffusé sur Twitter des photos de la catastrophe. Dès que le procureur a donné le nom du copilote, sa photo a circulé sur les réseaux sociaux à partir de Facebook et a été reprise par les médias. En effet, quand vous courez un marathon, une puce dans votre dossard permet de vous prendre en photo. Magnifique exemple de ce qu’est une identité numérique aujourd’hui.
 

La course aux clics, facteur de dérapages

L’aspect dangereux de cette course à l’information, c’est que celle-ci n’est pas vraiment vérifiée et qu’une photo d’une autre personne ne portant pourtant pas le même nom de famille a circulé et a été reprise par de nombreux médias.
De tels dérapages – la diffusion du nom d’un faux suspect– avaient été constatés lors de la fusillade du Washington Navy Yard et de l’attentat de Boston en 2013. Comme l’a souligné une étude menée par des chercheurs de l’IBM Research Labs de Delhi, 29 % des messages contenaient des informations fausses ou des spams, 50 % n’étaient que des opinions ou des commentaires, et seulement 20 % contenaient des informations factuelles vérifiées.
Cyber-enquêteurs amateurs et journalistes sont pareillement responsables de la diffusion de fausses informations. On a vu récemment, avec l’annonce erronée de la mort de Martin Bouygues par l’AFP, que la course à la publication de l’information et la concurrence exacerbée entre les médias font que ceux-ci ne prennent plus le temps de croiser les sources et de vérifier les informations.
La disponibilité d’un grand nombre d’images permet en outre le développement de théories conspirationnistes et fantaisistes fondées sur l’interprétation de telle ou telle photographie, comme on a pu le constater au moment des attentats contre Charlie Hebdo et le supermarché Hyper Cacher.
 

Former à l’évaluation critique de l’information et de ses sources

S’il est donc indispensable d’initier les élèves « à l’évaluation critique de l’information et des sources d’un objet médiatique », il faut que les éducateurs aient conscience que l’on peut passer de l’esprit critique à l’hypercriticisme et aux théories du complot – toute publication d’une photographie ou d’un arrêt sur image peut en effet relever d’une manipulation car elle est accompagnée d’une légende, d’un commentaire, placée en regard d’un texte et sous un titre.
Les journalistes sont plus que jamais nécessaires dans un monde qui tend à se passer d’eux pour faire le tri entre information et rumeur, pour sélectionner les informations dans le flux incessant. Il serait ainsi particulièrement utile de développer des rencontres et des travaux entre journalistes et enseignants d’autant plus que les élèves doivent « se questionner sur les enjeux démocratiques, civiques liés à l’information journalistique et aux réseaux sociaux en les éprouvant par la création de productions médiatisées ».

Daniel Salles

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Sur le site de « l’École des lettres »
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• La morale républicaine à l’école : des principes à la réalité, par Antony Soron.
• L’humour, valeur nationale : mallette théorique pour interventions pédagogiques, par Anne-Marie Petitjean.
• Lire en hommage ? – Lire les images, par Frédéric Palierne.
• Cogito « Charlie » ergo sum, par Antony Soron.
Le temps des paradoxes, par Pascal Caglar.
Le bruit du silence, par Yves Stalloni.
• Trois remarques sur ce que peut faire le professeur de français, par Jean-Michel Zakhartchouk.
• Paris, dimanche 11 janvier 2015, 15 h 25, boulevard Voltaire, par Geoffroy Morel.
• « Fanatisme  » , article du  » Dictionnaire philosophique portatif » de Voltaire, 1764.
• Pouvoir politique et liberté d’expression : Spinoza à la rescousse, par Florian Villain.
Racisme et terrorisme. Points de repère et données historiques, par Tramor Quemeneur.
 La représentation figurée du prophète Muhammad, par Vanessa Van Renterghem .
En parler, par Yves Stalloni.
« Je suis Charlie » : mobilisation collégienne et citoyenne, par Antony Soron.
• Liberté d’expression, j’écris ton nom. Témoignages de professeurs stagiaires.
• Quel est l’impact de l’École dans l’éducation à la citoyenneté ? Témoignage.
L’éducation aux médias et à l’information plus que jamais nécessaire, par Daniel Salles.
Où est Charlie ? Au collège et au lycée, comment interroger l’actualité avec distance et raisonnement, par Alexandre Lafon.
• « Nous, notre Histoire », d’Yvan Pommaux & Christophe Ylla-Somers, par Anne-Marie-Petitjean.
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Daniel Salles
Daniel Salles

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