Les lauréats du Diplôme d'études en langue française 2016 de l'académie de Paris accueillis en Sorbonne
.À la fin de l’année scolaire 2015-2016, plus de mille cent candidats se sont présentés au concours du DELF (Diplôme d’études en langue française) dans l’Académie de Paris. Ce diplôme que ses trente années d’existence ont conforté concerne des élèves allophones nouvellement arrivés en France. Il se décline selon sept différents niveaux d’acquisition de la langue française.
Mercredi 5 octobre 2016 dans le grand amphithéâtre de l’université Paris Sorbonne, c’est le DELF « scolaire », destiné aux adolescents de douze à dix-huit ans, qui était mis en valeur. Remis dans le « temple » des lettres françaises, le DELF représente pour tous ces jeunes gens aux origines et aux situations sociales les plus diverses un moment fort de reconnaissance du pays d’accueil propre à renforcer une estime de soi forcément ébréchée par les épreuves d’un voyage aux longs cours souvent semé d’embuches et de dangers et par une installation précaire en terre d’asile.
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Le solennel et le festif
Alain Seksig, responsable du Centre académique pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs de l’académie de Paris, demeure une nouvelle fois le grand ordonnateur d’une cérémonie qui a vu se succéder sur l’estrade, d’abord les référents de la République, Gilles Pécout, nouveau recteur de la région académique Île-de-France,
À mesure que la solennité de la cérémonie dévoile un caractère plus festif et plus réjouissant, l’auditoire a toutes les raisons de penser au fameux poème de Jacques Prévert, hommage aux « Étranges étrangers », et plus que jamais d’actualité …
“Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel
hommes de pays loin
cobayes des colonies
doux petits musiciens
soleils adolescents de la porte d’Italie
Boumians de la porte de Saint-Ouen
Apatrides d’Aubervilliers
brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris
ébouillanteurs des bêtes trouvées mortes sur pied
au beau milieu des rues
Tunisiens de Grenelle
embauchés débauchés
manœuvres désoeuvrés
Polaks du Marais du Temple des Rosiers
Cordonniers de Cordoue soutiers de Barcelone
pêcheurs des Baléares ou du cap Finistère
rescapés de Franco
et déportés de France et de Navarre
pour avoir défendu en souvenir de la vôtre
la liberté des autres
Esclaves noirs de Fréjus
tiraillés et parqués
au bord d’une petite mer
où peu vous vous baignez
Esclaves noirs de Fréjus
qui évoquez chaque soir
dans les locaux disciplinaires
avec une vieille boîte à cigares
et quelques bouts de fil de fer
tous les échos de vos villages
tous les oiseaux de vos forêts
et ne venez dans la capitale
que pour fêter au pas cadencé
la prise de la Bastille le quatorze juillet
Enfants du Sénégal
départriés expatriés et naturalisés
Enfants indochinois
jongleurs aux innocents couteaux
qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés
de jolis dragons d’or faits de papier plié
Enfants trop tôt grandis et si vite en allés
qui dormez aujourd’hui de retour au pays
le visage dans la terre
et des bombes incendiaires labourant vos rizières
On vous a renvoyé
la monnaie de vos papiers dorés
on vous a retourné
vos petits couteaux dans le dos
Étranges étrangers
Vous êtes de la ville
vous êtes de sa vie
même si mal en vivez, même si vous en mourez.”
.…Tout en faisant tourner en boucle la phrase forte, juste et à propos du préfet : « Une nation se construit autour d’une langue. »
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Une cérémonie qui met aussi en évidence
l’importance des acteurs institutionnels
Le drame continu des réfugiés échouant à Lampedusa la malheureuse, l’entassement intolérable des parias de Calais et bien d’autres faits divers spectaculairement tragiques influent légitimement sur l’opinion que l’on se fait de la capacité d’accueil et de l’Europe et de celle de la France. Dans ce contexte de négativité dominante, il faut rappeler combien certains acteurs institutionnels s’appliquent à démentir l’idée qu’il n’y a rien à faire ou que l’on ne peut rien faire pour eux.
L’existence de structures comme les Centres académiques pour la scolarisation des enfants allophones est d’une importance capitale et les professeurs des classes d’UPE2A (Unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants) ont une action déterminante pour faciliter l’accueil des enfants et des adolescents qui ne maîtrisent pas encore notre langue et leur permettre de s’engager ensuite dans les filières de formation classiques au collège et au lycée.
Les acclamations, les poignées de mains franches et les accolades spontanées entre les élèves primés et leurs professeurs qu’ils retrouvaient pour l’occasion en disaient long sur la fierté des uns et des autres du devoir accompli.
Tout cela en somme, comme l’a souligné Pierre Joxe avec malice, valait bien un dictionnaire encyclopédique, indispensable outil de tous les savoirs et de toutes les ouvertures culturelles remis à chacun avec le diplôme, pourvu simplement que, par une négligence coupable, on ne le laissât pas choir sur ses pieds.
Antony Soron, ÉSPÉ Paris
• Voir sur ce site :
– Premiers pas en France et en français : tout un parcours ! par Nadine Croguennec et Stéphane Paroux.
– L’accueil des enfants allophones à l’école : quelques exemples remarquables, par Claudine Nicolas.
– 500 élèves migrants à la Sorbonne pour la langue française, par Stéphane Paroux.
– « Tire ta langue » : comment valoriser la richesse des langues parlées par les élèves, par Frédéric Palierne.
• La fondation Seligmann créée en souvenir des combats menés par Françoise et François-Gérard Seligmann contre le nazisme au sein de la Résistance, et contre l’intolérance et l’injustice pendant la guerre d’Algérie, entend, “dans le respect de l’idéal laïque, œuvrer pour la victoire de la raison et de la tolérance, et promouvoir le rapprochement entre les citoyens et résidents étrangers de toutes origines rassemblés sur le sol français”.
• Daniel Assouline, directeur du Centre international d’études pédagogiques, présente le DELF et le DALF à l’occasion du trentième anniversaire de leur création.
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