L’École des lettres, n° 2 2021-2022
Fresque du climat, arbre du climat, climatKits, camps climat… Enseignants pour la planète, Savanturiers, ÉduClimat… Les activités fleurissent, pédagogiques et engagées, pour introduire un peu de savoirs et d’agir sur l’écoanxiété qui ronge. Trois-quarts des 16-25 ans interrogés dans dix pays du Nord et du Sud jugent l’avenir effrayant, alertait le 14 septembre une étude validée par la revue The Lancet Planetary Health. 45 % des 10 000 sollicités affirment que l’écoanxiété impacte leur quotidien. Une autre enquête, qualitative, menée par une pédopsychiatre française, Laelia Benoit, aux États-Unis, au Brésil et en France, établit que l’écoanxiété n’est pas une pathologie mais une « réaction saine face à une réalité difficile » et qu’il faut mettre des mots dessus pour « en faire quelque chose ». La santé mentale et la psyché sont les nouveaux terrains d’étude et les nouveaux baromètres de l’impact de la crise climatique. Outre les catastrophes naturelles et les conflits qu’elle engendre, l’onde de choc sur les émotions et les imaginaires transparaît, cette rentrée, dans plusieurs films : de I am Greta, de Nathan Grossman, à Une fois que tu sais, d’Emmanuel Cappellin, en passant par Animal, où Cyril Dion visite la planète de la sixième extinction de masse avec deux jeunes du mouvement climat en sondant : « Ça te fait quoi ? ».
Du côté de la littérature, la thématique écologique creuse un nouveau genre : le « cli-fi », pour « climate fiction », ou « fiction climatique ». Comme une réponse à un besoin criant de nouveaux récits pour imaginer un futur possible. Des histoires d’explorateurs, des objets de désir qui donnent envie d’aventures, de grandir et de vivre. « Il existait autrefois des sciences de l’observation… », commence l’écrivain Xavier-Laurent Petit avant de conter ses Histoires naturelles, collection née à l’école des loisirs pour inciter à aller « comprendre les phénomènes naturels qui nous entourent ». Verne, London, Kipling, Saint-Exupéry, Kessel, Renard, Monfreid, Bouvier, Thoreau, Krakauer, Powers, Bacigalupi, Vaye Watkins, Touzot, McCarty, Ballard ou Desplechin… la liste des renforts s’allonge heureusement.
Par temps de tempête sur la laïcité, le débat à lire dans ce numéro entre l’écrivaine Brigitte Smadja et le professeur d’histoire-géographie Jean-Riad Kechaou apporte du grain à moudre et du vent frais. En France, seuls 10 % des enfants de migrants, âgés de 6 à 8 ans, étaient bilingues additifs (ayant pu développer ses deux langues de façon équilibrée) en 2015, contre 60 % en Angleterre ou en Suède, apprend-on à la rubrique « Alphabétisation ». Les langues maternelles seraient moins valorisées dans l’Hexagone par peur du communautarisme, d’après la pédopsychiatre Marie-Rose Moro, alors qu’elles constituent une richesse culturelle, intellectuelle et cognitive.
Un grand merci enfin à Yvan Leclerc, professeur émérite de l’université de Rouen, pour ses analyses éclairées et éclairantes autour de Gustave Flaubert et du bicentenaire qui s’achève.
Bonnes lectures, bonnes explorations.