Le nouveau bac : simplification ou complication des parcours ?
Le nouveau bac est là. Juste à l’heure de Noël. Comme un cadeau sous le sapin. Dépliez-le. Regardez comme il est beau. C’est un jeu de construction.
On construit son parcours. En toute liberté.Trois spécialités en Première, deux spécialités en Terminale. Un enseignement facultatif en bonus. Le tout monté sur un socle de culture commune.
Les pièces du jeu sont listées comme sur une notice ikea, il n’y a qu’à prendre, emboîter, combiner…
Mais est-ce vraiment un cadeau ?
L’illusion du bac à la carte
Est-ce vraiment un cadeau l’indistinction des matières pour tous, la liberté des spécialités pour tous, l’illusion d’un bac à la carte ? Il est bien connu que la liberté de choisir n’est pas la même pour tous, selon où l’on naît, qui l’on est, quelle est l’offre et comment elle nous parle.
Simplification du parcours ? Craignons plutôt d’assister à une complication masquée, à des pièges ou des impasses, à des inégalités de niveau, d’équilibre entre les profils, entre les académies, les établissements.
Si la liste des spécialités fait la part belle aux matières scientifiques, deux fois plus nombreuses que les disciplines littéraires, elle ouvre aussi une variété d’options dangereuses :
– Quelle liberté si, du côté de Parcours Sup, les pré-requis en Maths sup, en prépa HEC en hypokhâgne mais aussi dans les diverses facultés de l’Université dessinent un profil particulier, appellent un parcours type ?
– Quelle liberté si les hiérarchies des prépas et des universités imposent leurs exigences, leurs critères, tolérant ou interdisant telle ou telle construction de spécialités ?
– Quelle liberté enfin si l’académie elle-même a organisé en amont les choix offerts dans les établissements ?
Le parcours à la carte s’avèrera alors un parcours de dupes.
Quels effets sur les programmes ?
Mais on peut craindre l’inverse : que la réforme du bac oblige à une réforme des formations supérieures, à une révision des programmes de prépa ou d’université. Déjà circule le bruit d’une refonte des voies en prépa HEC, des programmes et des épreuves… Que se passera-t-il bientôt dans les prépas littéraires, les maths sup…
Pour assurer un traitement égalitaire, les élèves d’horizons hétérogènes auront besoin d’un accueil plancher, situé à un niveau d’exigences minimales, étape liminaire à des modifications en chaîne…
Et si derrière la diversité se profilait la médiocrité ?
Quels dispositifs d’accompagnement ?
Moins d’épreuves au bac : cadeau ! Contrôle continu : cadeau ! Fin des filières : cadeau ! Parcours à sa guise : cadeau ! Est-ce cela la magie de Noël ? Un bac nouveau avec son air de fête, et ses cadeaux par milliers ? On voudrait y croire…
Aussi pour y croire sans risquer la désillusion, il faudra que les dispositifs d’accompagnement, d’orientation, d’information annoncés soient à la hauteur de l’enjeu, à savoir une meilleure insertion dans le supérieur.
Certes les nouvelles disciplines accaparent l’attention mais tout autant novateurs et indispensables ce sont bien les moyens d’aide à la construction du parcours – forums, salons, personnel à disposition, nombre d’heures alloués à l’orientation –, qu’il convient de surveiller et évaluer. L’égalité des chances en dépend plus que jamais.
Pascal Caglar
Quand j’ai appris ce qui attendait mon fils, il y a deux mois, lors d’une réunion d’informations pour son inscription au lycée, j’ai été prise d’une crise d’angoisse qui se confirme à la lecture de cet article. Je souhaite à tous les futurs lycéens de trouver des ressources pour s’en sortir, ça va être dur, compliqué, difficile, sans compter les voeux des parents qui ignorent tout du nouveau système et qui inscriront leurs enfants dans des établissements réputés sans forcément penser aux options…Il va y avoir des désillusions. Les cours privés eux vont se frotter les mains de plus en plus…Nous y sommes! Je remercie un proviseur de ma ville qui a accueilli des familles de futurs lycéens pour nous informer des réformes, il a tenu un discours très clair qui, il me semble, n’a pas été entendu. De futurs lycéens continueront à aller dans des établissements « réputés » sans se soucier des options proposées. Choix des familles! Inscriptions numériques! Manque d’information en général!