« Dis-moi dix mots sur le podium » : un concours à valeur pédagogique ajoutée
Par Antony Soron, maître de conférences HDR, formateur agrégé de lettres, Inspé Paris Sorbonne-université
Année olympique oblige, « Dis-moi dix mots » se lance dans les exploits sportifs en nommant dix mots et expressions 2023 « sur le podium », sous l’égide des ministères de la Culture et de l’Éducation. C’est l’occasion de préciser les intérêts et les enjeux d’un concours fructueux*.
Par Antony Soron, maître de conférences HDR, formateur agrégé de lettres, Inspé Paris Sorbonne-Université.
Le concours « Dis-moi dix mots » a été lancé en 2010 pour promouvoir la langue française sur toutes les aires francophones. Chaque année, une sélection de dix mots et expressions reliés à un thème et choisis par un réseau de partenaires francophones représentant la Fédération Wallonie-Bruxelles, la France, le Québec, la Suisse romande et l’Organisation internationale de la francophonie (qui regroupe 88 états et gouvernements), donne l’occasion d’investir la puissance imaginaire du langage.
« Le français est la langue officielle des Jeux olympiques et paralympiques aux côtés de l’anglais. C’est en effet grâce au baron Pierre de Coubertin que la tradition des Jeux olympiques, nés dans la Grèce antique, a été rétablie à l’époque moderne. Il est en effet à l’initiative de la création du Comité international olympique (CIO) qu’il présida pendant près de 30 ans. »
Pour la session 2023-2024, le corpus retenu est le suivant :
- Adrénaline
- Aller aux oranges
- Champion/Championne
- Collectif/Collective
- Échappée
- Faux départ
- Hors-jeu
- Mental
- Prouesse
- S’encorder
Le livret d’accompagnement permet d’éclairer le lien existant entre les dix mots :
« Le sport n’est pas seulement essentiel à la santé, il permet d’inculquer des valeurs de respect (jouer collectif, s’encorder) et de dépassement de soi (faire monter l’adrénaline, partir en échappée, réaliser des prouesses, devenir un champion). Le sport, c’est aussi la détermination (le mental), l’acceptation des règles (le faux départ, le hors-jeu) et le besoin de faire une pause (aller aux oranges)1. »
Les mots de l’année n’ont pas été choisis par hasard, ils offrent chacun leur propre rayonnement sémantique tout en demeurant reliés les uns aux autres.
« Les activités physiques contribuent à lutter contre l’échec scolaire et favorisent la réduction des inégalités sociales et culturelles ; « Dis-moi dix mots » vous propose de vous emparer de ce thème et d’illustrer votre amour ou votre désamour du sport, la crainte de l’échec et le goût de la victoire. N’oublions pas qu’il s’agit aussi de plaisir et de partage. »
L’organisation du concours
Outre les acteurs éducatifs, « Dis-moi dix mots » est une opération impliquant des intervenants culturels et sociaux. Pour s’en tenir au volet scolaire du concours, l’inscription d’une classe du 1er ou du 2nd degré en ligne, ainsi que l’envoi de la production collective, doivent être réalisés d’ici le 19 janvier 2024.
Cela implique que l’enseignant qui s’y engage avec sa classe démarre le projet au plus tard le 20 novembre 2023, pour une finalisation au plus tard le 08 janvier 2024 : soit 6 semaines de travail.
Comme le montrent les réalisations archivées des sessions précédentes3, la réussite du projet collectif dépend du degré d’investissement du groupe : il suppose, en amont, un travail d’organisation et d’explicitation, par exemple lors des deux semaines suivant la rentrée des vacances d’automne.
Les supports pratiques
Par rapport à d’autres concours destinés à des publics scolaires, « Dis-moi dix mots » s’appuie sur un « livret » extrêmement riche y compris sur le plan textuel4. Ainsi, dix nouvelles sont associées au corpus lexical de référence. On mentionnera, à titre d’exemple, celle de Bernard Chambaz, « L’un et l’autre », disponible en version PDF :
« Un méli-mélo de jambes, celles de l’auteur, et bien d’autres, une introspection sportive des jambes d’hier à aujourd’hui, un bel hommage au dépassement de soi. »
Que ces nouvelles soient étudiées en classe ou proposées en lecture cursive, c’est une belle opportunité offerte aux enseignants.
Enjeux pédagogiques
Le document de cadrage du « concours scolaire » développe trois champs de compétences :
– favoriser l’appropriation des mots et le travail sur la langue française ;
– encourager la créativité des élèves et leur permettre de nouer un rapport à la langue de culture, en tant que matériau d’expérimentation et de création ;
– apprendre aux élèves à travailler ensemble dans un esprit citoyen5.
Les dix mots de l’année constituent le moteur d’une initiative collective assise sur la recherche, la créativité et l’empathie. Les productions attendues peuvent, quant à elles, prendre des formes variées, même si trois grands types peuvent être dégagés :
– réalisation mêlant texte et une autre forme artistique ;
– production audio ou audiovisuelle, inférieure à 3 minutes et d’une taille maximale de 2 Go ;
– production graphique, plastique, théâtrale, chorégraphique, cinématographique, etc.
Compte tenu de l’ambition du projet, il reste hautement recommandable pour les professeurs de collège et de lycée de collaborer avec le professeur·e documentaliste de leur établissement. Cela permet :
– de mieux concilier les programmes et l’élaboration de la production pour le concours ;
– de rendre possible la constitution de demi-groupes.
Dans son ouvrage, Les 100 mots de la poésie, le critique et poète Jean-Michel Maulpoix écrit cette phrase qui peut inspirer les concurrents de « Dis-moi dix mots » :
« Si la poésie est ‘‘fille de l’étonnement’’, la poésie est elle aussi une forme de l’attention. Jean-Marie-Gustave Le Clézio nous en avertit dans L’Extase matérielle : ‘‘Il ne faut pas s’habituer. Il faut être stupéfait tout le temps, pour chaque nouvelle vision’’6.»
La cérémonie de remise des prix se déroule à la fin de l’année scolaire à l’Académie française, en présence du secrétaire perpétuel, l’écrivain Amin Maalouf, remplaçant l’ancienne députée européenne, Hélène Carrère d’Encausse, disparue le 5 août dernier.
Chaque année, cet événement laisse de grands souvenirs aux élèves qui ont la chance de venir présenter les œuvres lauréates réalisées avec leurs camarades. Sans compter que plusieurs établissements situés à l’étranger brillent par leur présence au concours.
À suivre très prochainement : L’École des lettres prépare, avec l’équipe de « Dis-moi dix mots » et l’école des loisirs, une sélection « Dis-moi dix livres » pour guider l’inspiration.
A.S.
*L’École des lettres est partenaire de longue date de ce concours en tant que membre du jury et l’école des loisirs, qui édite la revue, récompense les lauréats.
Ressources
(1) https://dismoidixmots.culture.gouv.fr/actualites/le-livret-dmdm-2023-2024
(2) https://eduscol.education.fr/3451/dis-moi-dix-mots-concours-des-dix-mots
(3) https://dismoidixmots.culture.gouv.fr/archives-dmdm/palmares-du-concours-scolaire-2022
(4) https://dismoidixmots.culture.gouv.fr/actualites/le-livret-dmdm-2023-2024
(5) https://eduscol.education.fr/document/43429/download
(6) Jean-Michel Maulpoix, Les 100 mots de la poésie, PUF (2021) : Avant-propos consultable en ligne.
L’École des lettres est une revue indépendante éditée par l’école des loisirs. Certains articles sont en accès libre, d’autres comme les séquences pédagogiques sont accessibles aux abonnés.