Dis moi dix mots, édition 2018 : sur tous les tons, sur toutes les lèvres
La remise des prix de l’édition 2018 du concours « Dis moi dix mots » à l’Institut de France ce jeudi 24 mai a été comme chaque année un moment d‘émotion et de conviction.
D’émotion parce que nul dans l’assemblée présidée par Hélène Carrère d’Encausse ne pouvait cette année encore retenir son admiration devant ces élèves de collège ou de lycée, de France ou de l’étranger, d’établissements réguliers ou d’établissements spécialisés, qui, avec leurs professeurs avaient conduit des projets remarquables sur le thème imposé, en l’occurrence l’« oralité », mêlant ingéniosité, inventivité et technicité, témoignant s’il en était besoin, que le travail collectif, le travail interdisciplinaire, le travail gratuit, fédère les énergies, galvanise l’enthousiasme.
Oui ce concours à la participation croissante soulève des montagnes : cette année le premier prix est revenu aux classes d’élèves déficients auditifs du collège Gaston-Bachelard de Dijon pour une incroyable mise en scène artistique des mots du concours dans le langage des signes.
De même, pour l’étranger, c’est le lycée français d’Accra au Ghana qui, en pleine zone anglophone, faisait entendre une poétique et naïve version des Mille et Une Nuits, ou encore celui de Quito en Équateur qui nous envoyait son étonnant film d’animation, puis plus près de nous, le lycée des métiers de la mode près de Lyon proposait une broderie au sens propre comme au sens figuré sur le thème du voyage, et enfin, après les réalisations malicieuses et justes des lycées de Bordeaux, Grenoble ou d’Amiens, l’Institut d’éducation motrice de Nantes livrait son remarquable roman-photo pour allophone présenté dans cette salle de l’Académie française par deux enfants handicapés émus et heureux du travail accompli, forçant l’admiration de l’assistance.
De conviction aussi parce que cette année, plus sensiblement encore que les années passées, le concours prenait valeur d’étendard d’une mobilisation militante pour la défense de la langue, l’apprentissage du lexique et de l’histoire des mots, du collège au lycée, de France aux confins des terres francophones.
Dans les discours de tous les partenaires de l’événement, la Dgesco, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France, le Réseau Canopé, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, la Ligue de l’enseignement, l’Inspection générale, sur tous les tons et sur toutes les lèvres se faisait entendre la nécessité d’un travail sans relâche pour mieux amener à la maîtrise de la langue française. Ce n’est pas un hasard si Alain Rey lui même remettait le dernier prix à l’IEM de Nantes rappelant que tous nous sommes en situation d’allophones lorsqu’il s’agit d’apprendre le français.
Déjà à l’ouverture de cette cérémonie Hélène Carrère d’Encausse avait souligné la vitalité de la langue, saluant l’inventivité des Québecois, qui préfèrent le savoureux « ego-portrait » à l’insipide « selfie », et un peu plus tard le travail de réalité augmentée présentée par les élèves d’établissement professionnel devenait le symbole d’une langue française s’enrichissant sans cesse, augmentant son bien et sa réalité.
L’oralité, ce thème 2018, était donc plus que dix mots en l’air à recueillir pour un joli concours. À entendre les représentants de nos ministère de la Culture et de l’Éducation nationale l’oralité est un objectif réaffirmé pour notre enseignement, une reconquête décomplexée de l’art oratoire, de l’éloquence française réconciliée avec son passé. Le concours Dis moi dix mots a non seulement une valeur exemplaire en matière pédagogique, en terme de travail collaboratif, il se colore de valeurs initiatrices, ouvrant la voie aux prochaines orientations de l’enseignement du français.
Pascal Caglar
• Télécharger la plaquette Dis-moi dix mots 2017-2018.
• Les travaux réalisés par les lauréats 2018 seront prochainement mis en ligne sur ce site. Voir les créations des lauréats des années précédentes.