Au sommaire de « l’École des lettres » (numéro 4, 2020-2021)
DOSSIER JAPON
◆ « Dans la forêt de Hokkaido », d’Éric Pessan. Du fait-divers au conte fantastique, par Philippe Leclercq.
Dans la forêt de Hokkaido (« Médium + » et « Médium + poche ») naît dans un cri, un long cri douloureux comme Julie n’en a jamais poussé, venu de loin, du ventre, de la terre. D’une terre ceinte par la mer… D’une route située en bordure de forêt sur l’île japonaise de Hokkaido. Là, au moment où un petit garçon de sept ans ouvre la bouche en regardant la voiture de ses parents s’éloigner sans lui, Julie, quinze ans, s’extrait de son sommeil en hurlant dans son lit, en France. D’effroi, reliée à l’enfant lointain qui sent son corps se vider de son souffle, de la vie qui le rattache à ses parents…
Éric Pessan s’empare dans son nouveau roman d’un fait-divers peu ordinaire survenu au Japon en 2016 et qui, durant cinq jours, tint la population en haleine : des parents, excédés par les caprices de leur rejeton, firent mine de l’abandonner au bord de la route avant de revenir le chercher. Dans l’intervalle, l’enfant avait disparu…
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◆ « Les Libellules rouges », de Reiko Kruk-Nishioka. Sur les ailes de la découverte… de soi, par Frédéric Palierne.
Dans Les Libellules rouges (éditions Globe, 2020), la créatrice Reiko Kruk-Nishioka, que son travail a conduite dans les sphères de l’audiovisuel et, notamment, dans le maquillage d’effets spéciaux, revient sur son enfance, celle d’une petite fille fascinée par les « libellules rouges », avions à la technologie dépassée que le Japon envoyait s’écraser sur la flotte américaine pendant la Seconde Guerre mondiale. C’était pendant l’été de Nagasaki…
Tout commence dans une atmosphère de rêve. Nous suivons la fillette (neuf ans en août 1945) durant le dernier été de son enfance et d’un Japon impérial dominateur, celui qui verra les deux explosions nucléaires mettre fin à la guerre. D’Hiroshima il ne sera presque jamais question dans ce livre qui déroule l’événement à travers les yeux de l’enfant. Reiko, que l’on appelle Keiko, vit à une vingtaine de kilomètres de Nagasaki – elle sera donc témoin de l’explosion de cette seconde bombe, mais de trop loin pour être véritablement marquée.
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◆ « Dans un recoin de ce monde », de Sunao Katabuchi. « Tu n’as rien vu à Hiroshima. Rien », par Antony Soron.
Si, avec Les Enfants d’Hiroshima, docufiction de Kaneto Shindô (1952), ou Hiroshima, film dramatique réalisé par Hideo Sekigawa (1953), le cinéma japonais a déjà scénarisé à plusieurs reprises l’une de ses plus grandes blessures historiques, c’est Gen d’Hiroshima, le long-métrage d’animation de Mori Masaki (1983), qui reste le plus souvent dans la mémoire des spectateurs. Inspiré du manga de Keiji Nakazawa, il adopte, à partir du récit autobiographique d’un « hibakusha » (un survivant de la bombe), un point de vue hyperréaliste.
Trente-trois ans plus tard, Dans un recoin de ce monde (2016), adapté par Sunao Katabuchi du manga de Fumiyo Kôno (éditions Kana, 2016), propose le parti pris esthétique inverse.
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CLASSIQUES & PÉDAGOGIE
◆ Molière fait-il encore rire ? Enseigner Molière au XXIe siècle, par Haude de Roux.
Molière fait-il encore rire ? La question peut paraître une provocation. Particulièrement venant d’un professeur de lettres. Pourtant, à regarder nos élèves assis sans réaction à la lecture d’une scène de l’illustre dramaturge, elle s’impose d’elle-même.
Dans le secondaire, son œuvre est toujours au programme. En 2019- 2020, L’École des femmes était proposée aux classes de première de la voie technologique. Pour l’année 2020-2021, Le Malade imaginaire est à étudier par l’ensemble des premières.
Au collège aussi, Molière reste à l’honneur. Depuis trente ans, Le Médecin malgré lui invite les collégiens à décortiquer les principes fondamentaux qui déclenchent le rire : un geste, un mot, un bégaiement, une situation, un caractère… Si nous ne pouvons que nous réjouir de la permanence de ce choix, il devient néanmoins de plus en plus difficile de convaincre les élèves de la drôlerie de Molière.
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CLASSIQUES & CINÉMA
◆ « L’Histoire personnelle de David Copperfield », d’Armando Iannucci. Nouvelle jeunesse pour « David Copperfield », par Philippe Leclercq.
En choisissant pour titre de son adaptation celui que donna, ou peu s’en faut, l’écrivain Charles Dickens à son huitième roman, L’Histoire, les Aventures et l’Expérience personnelles de David Copperfield le jeune, le réalisateur britannique Armando Iannucci semble indiquer sa volonté de demeurer fidèle à la trame du récit. Il s’y efforce, s’y tient (ne fût-ce que dans la première partie), guidé par le souci de la cohérence narrative, en dépit des inévitables coupes et fusions / condensations (de lieux et de personnages), et en apportant un soin appliqué à la reconstitution de l’ère victorienne.
Dans tout travail d’adaptation, l’effort consiste non tant à préserver, élaguer, ajouter ou transformer le texte original qu’à l’appréhender avec un œil neuf, à diriger sur lui un éclairage nouveau afin d’en proposer une lecture renouvelée et de lui faire dire ce qu’il n’a pas encore dit.
Le propre des grandes œuvres classiques est de n’être jamais entièrement vidées de leurs sens, de ne jamais finir de se révéler à notre intelligence, à notre plaisir de les lire et de les donner à relire à travers des images inédites et signifiantes de l’époque de leur réalisation.
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LITTÉRATURE DE JEUNESSE
◆ Autobiographie et liberté d’expression. Séquence pour une classe de troisième, par Antony Soron.
Les programmes de français de la classe de troisième proposent trois entrées que l’on peut avantageusement croiser : « Se raconter, se représenter », « Dénoncer les travers de la société » et « Agir dans la cité : individu et pouvoir ». Le champ littéraire de l’écriture de soi, qu’elle soit réelle ou fictive, a, en effet, souvent pour enjeu de mettre en perspective la maturation d’un enfant dans le contexte d’une liberté entravée soit par la guerre, soit par un pouvoir dictatorial.
À ce titre, il peut être intéressant de proposer aux élèves un groupement de textes intitulé « Autobiographie et liberté d’expression », dans lequel on trouvera des extraits de À la guerre comme à la guerre, de Tomi Ungerer ; Mao et moi, de Chen Jiang Hong ; Sothik, de Marie Desplechin et Sothik Hok ; et L’Oasis, de Xavier-Laurent Petit, autant d’œuvres dont ils seront bien sûr invités à poursuivre la découverte en lecture cursive.
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LITTÉRATURE CONTEMPORAINE
◆ « Carnet d’adresses de quelques personnages fictifs de la littérature », de Didier Blonde. Le Paris de Didier Blonde, par Robert Briatte.
L’Atelier d’Alberto Giacometti, essai paru en 1958, compte parmi les nombreuses œuvres de Jean Genet – à commencer par Notre-Dame-des- Fleurs – que publia Marc Barbezat, le fondateur de la revue L’Arbalète, puis des éditions du même nom.
Archiviste passionné de la géographie littéraire de Paris, qu’il arpente en tous sens, Didier Blonde a immanquablement pensé au sculpteur de « L’homme qui marche », Parisien d’adoption dont l’atelier se trouvait rue Hippolyte-Maindron, dans le XIVe arrondissement.
Avec son Carnet d’adresses de quelques personnages fictifs de la littérature, qui paraît également à L’Arbalète, il emboîte donc le pas de ses illustres prédécesseurs dans la découverte des lieux – réels ou non – de la capitale telle qu’ils l’ont rêvée.
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THÉÂTRE
◆ « Une lumière au cœur de la nuit », de Georges Banu.Célébration du théâtre par le lustre, par Alain Beretta.
En publiant, en février 2020, Une lumière au cœur de la nuit (éditions Arléa), Georges Banu ne pouvait imaginer célébrer ce qui allait disparaître pendant des mois pour cause de pandémie : la féerie des salles de spectacle. Cette féerie, il la condense dans un objet qui, pour paraître accessoire, n’en est pas moins emblématique du lieu théâtral : le lustre.
Professeur, critique théâtral et, surtout, amoureux fou du théâtre, auquel il a consacré près d’une trentaine d’ouvrages qui lui valurent plusieurs distinctions (notamment le Grand prix de l’Académie française, en 2014), Georges Banu développe, au fil des vingt-neuf chapitres qui composent son ouvrage, une « mythologie » du lustre que n’aurait pas reniée Roland Barthes, déployant ses effets, ainsi que l’indique le sous-titre du livre, « de l’intime à la scène »…
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PÉDAGOGIE DE PROJET & HISTOIRE
◆ « Je vous donne un rôle, une mission : devenir passeurs de mémoire. » Des lycéens face à la mission de Ginette Kolinka, par Thérèse de Paulis.
Un travail sur la mémoire des génocides et la prévention des crimes contre l’humanité a amené les élèves de la section professionnelle François-Truffaut du lycée Simone-Weil à s’engager dans un projet d’éducation citoyenne, culturelle et professionnelle en partenariat avec l’association « Histoire et Mémoire du IIIe arrondissement », à Paris.
Depuis bientôt deux ans, les lycéens de bac professionnel AGOrA (Assistance à la gestion des organisations et de leurs activités) élaborent et mettent en œuvre un projet s’appuyant sur l’enseignement de l’histoire en classe, projet qui mobilise leurs compétences dans les disciplines générales (français, arts appliqués, mathématiques, EPS) et professionnelles (gestion, administration, économie, droit, prévention-santé- environnement).
C’est là l’originalité de l’entreprise : pour ces futurs gestionnaires administratifs, l’éducation au travail de mémoire participe ici de la consolidation et du réinvestissement des compétences travaillées en classe à travers des activités inscrites dans les référentiels et intégrant, par exemple, conception de projet, communication, support à la production, etc. C’est pourquoi ce projet pourrait entrer dans le cadre du chef-d’œuvre présenté par l’élève devant son jury d’examen.
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TERRITOIRES VIVANTS DE LA RÉPUBLIQUE
◆ « La France des Belhoumi. » Raconter et jouer au lycée l’histoire d’une fratrie d’origine algérienne, par Stéphane Beaud & Dominique Lurcel.
Comment transmettre aux lycéens et lycéennes d’aujourd’hui l’histoire de l’immigration algérienne en France ? Comment faire partager cette histoire tragique et compliquée à des élèves qui peuvent parfois avoir une relation forte et intime avec ce pays à travers leurs parents et grands-parents (qu’ils soient « pieds-noirs », « français musulmans », « harkis ») – ou en être très éloignés ?
Telles sont les questions auxquelles s’efforcent de répondre Stéphane Beaud, sociologue et professeur de science politique à Sciences Po Lille, et Dominique Lurcel, metteur en scène, directeur de la compagnie théâtrale Passeurs de mémoires, à travers plusieurs interventions faites dans les lycées, ainsi qu’un spectacle réalisé autour du livre de Stéphane Beaud, La France des Belhoumi (La Découverte, 2018).
L’ouvrage retrace quarante années (1977-2017) de l’histoire d’une fratrie de huit enfants, montrant les disparités de destins scolaires et professionnels entre les cinq filles (devenues « classes moyennes ») et les trois garçons (restés ouvriers/employés) qui la composent.
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PÉDAGOGIE DE PROJET & LETTRES
◆ Faire entrer les métiers dans l’école. Parcours « Métiers du livre » & « Métiers du droit », par Violaine Lucas.
La pandémie de Covid-19 nous a incités à expérimenter d’autres façons d’enseigner et à nous pencher, notamment, sur la mise en place de classes virtuelles et hybrides (cf. L’École des lettres, n° 3, 2020-2021). Cette école réinterrogée me permet, pour ma part, de reprendre dans une perspective nouvelle les autres formes d’hybridation nécessaires à l’école, ce que je me suis efforcée de faire, par le passé, en introduisant dans les murs du collège et du lycée les acteurs des métiers du livre (parcours « De l’auteur au lecteur ») et des métiers du droit (concours de plaidoiries et d’éloquence).
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◆ Faire entrer les comédiens dans l’école. Pour les élèves, le spectacle continue, par Pascal Caglar.
Le théâtre doit se réinventer, entend-on de plus en plus ces derniers temps. Et, à défaut de voir les salles se rouvrir, nous voyons des sites, des plates-formes et des liens Internet nous proposer, gratuitement ou pas, des spectacles filmés, anciens ou récents, des répétitions, des interviews, des lectures…
Ces initiatives, impulsées par les théâtres mêmes, ont peut-être le mérite d’élargir ponctuellement leur public (le nombre de connexions sera toujours plus important que le nombre de spectateurs par séance). Mais ce n’est pas se réinventer que de passer de la salle à l’écran, de l’œil à la caméra, c’est perdre un peu de son âme pour garder un peu de présence. Du reste, nombreux sont ceux qui, dans le métier, ont conscience de ce pis-aller, de cette manière désespérée de dire : « On ne vous oublie pas, on vous attend avec impatience », comme d’autres envoient une lettre pour pallier une absence de visite.
Cependant, si le public d’amateurs n’a pas d’autre choix que ces retransmissions de consolation, le public scolaire, lui, peut compter sur des contacts renouvelés car les acteurs ne jouent pas mais restent disponibles…
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HISTOIRE DE L’ÉDUCATION
◆ Pour une culture scolaire des professeurs. Connaître l’histoire de l’école pour mieux enseigner, par Alexandre Lafon.
Les débats récurrents sur la laïcité et les valeurs de la République pèsent sur l’école. D’autant qu’elle se définit, à l’image de notre modèle de gouvernement et depuis les grandes lois Ferry de 1881-1883, précisément sur ce principe fondateur de laïcité.
Sur le terrain, les enseignants, du premier comme du second degré, peinent à appréhender pleinement cette question face à des atteintes aux fondements de notre « vivre-ensemble » de plus en plus nombreuses et inacceptables.
Selon une enquête du 6 janvier 2021 menée par l’IFOP, la Fondation Jean-Jaurès et Charlie Hebdo, 49 % des professeurs interrogés (soit 13 points de plus depuis 2018) affirment s’être déjà autocensurés dans leur enseignement des questions religieuses afin de ne pas déclencher d’éventuels incidents dans leur classe.
L’une des premières causes de ce paradoxe (une école laïque qui répond difficilement à la mise en cause de son principe fondateur) ne serait-elle pas le manque de connaissances du corps enseignant sur sa propre histoire et les valeurs qui la portent ?
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