Brigitte Giraud, prix Goncourt 2022
La romancière a remporté, ce jeudi 3 novembre, la prestigieuse récompense pour Vivre vite (Flammarion). Un très beau roman universel où elle enquête sur les journées qui ont précédé l’accident mortel de son compagnon. Elle publie également Porté Disparu (l’école des loisirs), un roman choral sur la disparition d’un jeune lycéen après un exposé en classe.
Par Norbert Czarny, critique littéraire
La romancière a remporté, ce jeudi 3 novembre, la prestigieuse récompense pour Vivre vite (Flammarion). Un très beau roman universel où elle enquête sur les journées qui ont précédé l’accident mortel de son compagnon. Elle publie également Porté Disparu (l’école des loisirs), un roman choral sur la disparition d’un jeune lycéen après un exposé en classe.
Par Norbert Czarny, critique littéraire
Le jury du Goncourt a désigné à la mi-journée Vivre vite, de Brigitte Giraud (Flammarion), comme lauréat cette année. Soit un roman universel sur le hasard qui domine nos vies, fait basculer vers le pire, ici le deuil, en un fragment de seconde. Brigitte Giraud y relate la mort de Claude, son compagnon, victime d’un accident de moto. Elle décrit chapitre après chapitre ces infimes détails qui, longtemps avant l’accident, et le jour même, ont préludé au drame. C’est un roman au conditionnel passé, le mode que l’on emploie pour dire le regret, l’irrémédiable.
« Peut-être que les mots aident à conjurer le sort », a réagi la romancière après l’annonce d’une des plus prestigieuses récompenses de la littérature francophone. L’intime n’a de sens que s’il résonne avec le collectif. […] J’ai envie de penser que [les jurés] ont vu cette dimension beaucoup plus large qu’une simple vie intime, qu’une simple destinée. »
Depuis Leïla Slimani, prix Goncourt 2016 pour Chanson douce, Brigitte Giraud est la première autrice à en être couronnée : « Ce n’est pas en tant que femme que je reçois le prix, mais en tant que personne qui travaille la littérature depuis des années », a-t-elle souligné.
En effet, ce que ce prix récompense, c’est un ensemble : Brigitte Giraud est née en 1960 à Sidi Bel Abbès, en Algérie. Son père, appelé, y servait comme infirmier. Elle a grandi dans la banlieue de Lyon, et a exercé divers métiers, dont celui de libraire, avant de se consacrer à l’écriture. Elle a dirigé un temps « La forêt », une collection chez Stock où elle a publié notamment Dominique A. (Y revenir), Fabio Viscogliosi (Apologie du slow) ou Mona Thomas (Leman). Depuis La Chambre des parents en 1997 (Fayard), elle a publié une dizaine de romans, dont les deux derniers, Vivre vite (Flammarion) et Porté disparu (l’école des loisirs), cette année.
C’est donc l’histoire d’un être lié à la grande histoire. Ce sont des événements comme la guerre d’Algérie, la culture, et en particulier la musique que la romancière met en lumière. Pour mémoire, le jury Goncourt de 1978 avait primé Modiano pour l’ensemble de son œuvre, au-delà de Rue des boutiques obscures.
Face à Vivre vite, le passionnant Mage du Kremlin (Gallimard) avait à la fois le mérite et le tort d’être dans l’actualité. Giuliano da Empoli, tout juste primé par l’Académie française, raconte le pouvoir russe, évoque les figures maléfiques qui entourent l’autocrate, explique la stratégie du chaos, et, depuis février 2022, tout cela résonne furieusement. Au risque de privilégier le thème aux dépens de l’écriture. Le réel fait oublier qu’il s’agit d’une fiction, une construction romanesque. Deux auteurs trentenaires étaient également en lice : Chloé Korman pour son roman Les Presque Sœurs (Seuil), une enquête sur trois petites-cousines victimes de la Shoah et déportées avec trois amies. Six petites filles ayant vécu l’horreur ensemble. Et Makenzy Orcel pour Une somme humaine (Rivages), sorte d’autobiographie d’une morte où l’écrivain haïtien déploie, sur près de 600 pages, une voix sans points ni virgule, où la parole est fleuve et poésie.
N. C.
Retrouvez Brigitte Giraud dans différents articles et podcast mis en avant dans nos pages.
- Podcast Ailes de géant : Brigitte Giraud autour de son roman Porté Disparu (l’école des loisirs), Ingrid Merckx.
- « Ce qui me pousse à écrire c’est la question de la manipulation des masses », entretien avec Brigitte Giraud, Ingrid Merckx, L’École des lettres, décembre 2022-février 2023.
- « Trouver les mots », Norbert Czarny, L’École des lettres, décembre 2022-février 2023
- Brigitte Giraud, ancrée dans le présent, Norbert Czarny, 13 septembre 2022.
L’École des lettres est une revue indépendante éditée par l’école des loisirs. Certains articles sont en accès libre, d’autres comme les séquences pédagogiques sont accessibles aux abonnés.
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