Parodies et inversions se mêlent dans cette curieuse composition que l’auteur anonyme baptise « chantefable » au moment de prendre congé de ses auditeurs. Hormis les audaces littéraires et les allusions railleuses aux poncifs esthétiques qui ont cours entre la fin du XIIe siècle et la première moitié du XIIIe siècle, l’historien trouve abordées dans « Aucassin et Nicolette » nombre de questions socioculturelles essentielles. Il s’agit d’abord de comprendre l’implantation géographique du récit en Provence et ses références aux conflits féodaux, le choix de la ville de Beaucaire comme décor principal, ainsi que les rapports entre cette ville et d’autres lieux cités dans la chantefable. Par ailleurs, les relations entre les personnages illustrent plusieurs usages sociaux qui méritent d’être replacés dans leur réalité historique afin d’apprécier les inventions littéraires de l’auteur : liens familiaux, hiérarchies politico-sociales, rapports entre les sexes. Enfin, la résonance exacte des valeurs et des croyances auxquelles se réfèrent les héros doit être précisée.