Pourquoi faire étudier en première «Thérèse Desqueyroux», de François Mauriac ?
Lire un roman ne va plus de soi pour un élève de première : « Des pages bourrées de lignes comprimées entre des marges minuscules, de noirs paragraphes entassés les uns sur les autres et, par-ci par-là, la charité d’un dialogue […] c’est épais, c’est compact, c’est dense, c’est un objet contondant, un livre », écrivait déjà Daniel Pennac dans Comme un roman.
Le premier avantage, très prosaïque, qu’offre Thérèse Desqueyroux, c’est d’être un roman assez court, tout en restant une œuvre phare du genre au XXe siècle.
Ensuite, ce roman présente une structure classique, et suit une composition rigoureuse qui permet d’initier les élèves à la construction d’un récit. Mauriac a retenu des choix narratifs intéressants à faire découvrir parce qu’ils sont porteurs de sens et qu’ils peuvent devenir des outils pour faire écrire ou réécrire les élèves.
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L’intérêt du roman
D’un point de vue culturel, cette œuvre les fait entrer dans un monde daté, qui est organisé selon des valeurs, celles de la bourgeoisie provinciale catholique des années 1920-1930, qui sont suffisamment différentes des valeurs en cours dans notre société actuelle pour dépayser les élèves et les faire réfléchir.
Thérèse Desqueyroux permet donc de montrer aux élèves comment « le roman exprime une vision du monde qui varie selon les époques et les auteurs et dépend d’un contexte littéraire, historique et culturel, en même temps qu’elle le reflète, voire le détermine » (BO spécial n° 9 du 30 septembre 2010).
Enfin, Mauriac a construit un personnage très ambigu auquel il donne dans l’excipit une totale liberté en le laissant partir dans un lieu ouvert, les rues de Paris, la capitale qui représente le lieu de tous les espoirs.
Il est impossible de juger définitivement Thérèse qui ne connaît « aucune logique autre que cette logique de la vie qui, du point de vue de notre raison, est l’illogisme même » (François Mauriac, Le Roman, chap. VI). Comme s’il prolongeait le procès, le romancier entretient un non-lieu permanent, il empêche les jugements péremptoires et récuse le manichéisme. Thérèse Desqueyroux est un roman ouvert, qui pose des questions parce que le personnage principal « qui se penche sur sa propre énigme » résiste à l’analyse, à la fois héritier du « je ne sais quoi » des classiques et précurseur du Nouveau Roman qui se développe après la Seconde Guerre mondiale.
Cette œuvre est donc porteuse de valeurs humanistes : il peut être en effet intéressant de proposer à des adolescents, souvent prompts aux jugements hâtifs et discriminants, la lecture de ce roman qui les invite à comprendre que la nature humaine est plus complexe qu’il ne le paraît.
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Mode d’emploi du dossier
Ce dossier à vocation pédagogique vise à prendre en compte au plus près les acquis des lycéens et les compétences qu’il convient de développer au cours de leur formation.
L’étude du roman favorise comme il se doit l’apprentissage de notions culturelles et linguistiques mais veille à ne pas l’instrumentaliser et souligne bien le rapport entre les choix d’écriture et les problématiques de sens qui le parcourent.
Ce dossier ne concurrence aucunement les travaux universitaires menés sur l’œuvre de Mauriac, même s’il prend en compte certaines orientations des recherches menées dans ce domaine.
Il ne vise pas non plus à l’exhaustivité dans l’analyse de l’œuvre, ce qui ne relève pas de la fonction de l’enseignant de lycée. En revanche toutes les activités ont été choisies en fonction de quelques fils directeurs correspondant à des parcours possibles du roman. Le souci des auteurs a été de proposer une démarche cohérente permettant, à travers des activités variées, de suivre chacun de ces parcours dont le détail sera proposé à la fin de cette introduction.
En pratique, il n’est pas envisageable de traiter toutes les pistes proposées, chaque enseignant choisira le ou les parcours qui lui conviennent. Pour faciliter les choix, nous avons classé les différentes activités en trois types : les explications de texte, les perspectives complémentaires et les vues d’ensemble sur l’œuvre intégrale.
Le dossier est donc composé de fiches de formes diverses : questionnaires, tableaux à compléter, lanceurs d’écriture, éléments de lecture d’une page, textes de synthèse, documents à comparer etc. À travers ces formes multiples, il prend en compte l’usage de l’outil informatique autant que celui d’une pédagogie traditionnelle.
Les fiches proposées comportent dans un encadré des pistes – non exhaustives – sur les situations et les usages pédagogiques qui peuvent être mis en œuvre. Dans la mesure du possible, il semble préférable de réaliser les premières activités de l’œuvre avant que les élèves n’aient lu l’œuvre complète afin que la découverte collective du roman soit authentique.
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Les parcours sélectionnés sont les suivants
1. Au seuil de l’œuvre.
2. Une construction romanesque symbolique.
3. Regard sur un univers social.
4. Reconstitution d’un procès : Thérèse coupable ou victime ?
5. Une poétique de la simplicité.
6. Ouverture : un roman, son adaptation filmique et d’autres œuvres.
Marlène Guillou et Myriam Lobry
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• Pour lire et télécharger l’intégralité de cette étude (80 pages), abonnez-vous à « l’École des lettres des lycéee » (34 € par an, accès aux articles et dossiers de 1995 à 2016).
Poétique, et la simplicité.